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vendredi 27 novembre 2015

Du Désir à la Joie : 6 : Accueillir l'Instant Présent


Chapitre 6 : Accueillir l'Instant Présent


Sans désir, sans attente, il ne reste plus qu'une solution, c'est de prendre la vie comme elle vient. Tout nous convient, puisque nous n'attendons rien. Mais comme malgré tout, nous aimons quand les choses se passent bien plutôt que lorsqu'elles se passent mal, nous faisons notre possible pour aider le moment présent à s'accomplir. Nous ne sommes donc pas inactifs, mais notre action est centrée sur le moment présent. C'est ce que Lao Tseu appelle le Non-Agir. Ne préméditer aucun acte, ne regretter aucune situation, c'est ce à quoi conduit le Non-Désir.
Nous accueillons l'instant présent avec plaisir, nous comprenons petit à petit que ce qui s'y déroule, et dont nous faisons parti, est l'état dans lequel se trouve le cosmos (du microcosme au macrocosme), et que celui-ci ne peut faire autrement que nous offrir le moment présent tel qu'il est. Il n'y a pas d'alternative. L'impression que nous avons de changer les choses est une illusion, car le moment présent est un et un seul.


Si nous tentons de modifier le cours de la vie, et que nous y parvenons, c'est qu'en fait un fort désir était monté en nous, nous poussant à agir. Pour l'Univers, les causes entraînent des effets : que ces causes viennent du désir d'un individu ou de l’enchaînement d'un événement, le résultat est le même. De plus, nous pouvons nous poser la question : qu'est-ce qui est à la racine du désir ? Quelle en est la cause ? Croire que cette cause nous est due est une illusion. C'est le cosmos dans son évolution générale qui fait naître en nous nos désirs. L'impression d'être un acteur de l'Univers est une illusion du désir. En réalité, comme Lao Tseu le dit, nous sommes des Non Acteurs. Ceux qui vivent sans désir en ont conscience, les autres non. Ils vivent dans le rêve d'une vie individuelle, alors que comme tout un chacun, ils ne sont qu'une partie du cosmos. Mais vivre cette partie du cosmos, instant après instant est une fantastique aventure. C'est celle que vit intensément l'homme libre de ses désir, plongé dans l'instant présent.


Quand nous savons que la vie se joue là dans l'instant présent, nous ne sommes plus tentés de voir ailleurs en ressassant le passé ou en faisant des spéculations sur l'avenir, ni même en enviant notre voisin. Nous nous contentons d'accueillir le moment, avec toute sa richesse et sa profondeur. Une telle prédisposition nous conduit à suivre toutes les opportunités de l'instant. Nous sommes à l'image de Tchouang Tseu lorsqu'il court après les papillons. Nous sommes attirés par la beauté de l'instant, et nous la suivons, mieux, nous l'accueillons.  
En accueillant l'instant présent, nous faisons le plus grand acte de foi que nous puissions offrir à l'Univers. Nous allons jusqu'à accueillir nos "ennemis" à bras ouverts. En effet, nos ennemis ne sont nos ennemis que sur une divergence de désirs. Etant sans désir, nous n'avons plus d'ennemi. Nous pouvons aimer l'humanité dans son ensemble, nous pouvons aimer le règne animal dans son ensemble (même les insectes et les moustiques, comme le font des sages indiens). et aimer la Terre et la vie dans son ensemble. La porte d'entrée de cet amour universel est celle de l'instant présent.


Accueillir la vie au fil des jours nous met en joie. C'est la joie de l'amour sans objet, l'amour inconditionnel. Nous devons bien comprendre que cette joie vient spontanément par le mécanisme du Non-Désir. Cette joie est notre nature. Ce ne sont que les frustration du désir qui masquent la joie. Celle-ci est latente. Elle ne s'impose pas et s'efface même devant nos désirs. D'ailleurs, lorsque nous réalisons un de nos désirs, il y a une petite période sans désir où nous profitons de cet accomplissement. Il est alors possible de ressentir cette joie sous-jacente. Accueillir l'instant présent, c'est se mettre en harmonie avec la nature, de cette harmonie naît la joie.


vendredi 20 novembre 2015

Du Désir à la Joie : 5 : La Conscience

Chapitre 5 : La Conscience


Connais toi toi-même, peut-on lire sur le fronton du temple à Delphe... Qui sommes-nous, ou peut-être que sommes-nous ? Est la question que nous, chercheurs de vérité devons nous poser. La première réponse que nous donnons à cette question est notre état civil. Mais ce nom et ce prénom, nous ne les avons même pas choisi... Comment pourraient il nous représenter avec toute la richesse qui caractérise un être humain ? On peut être tenté de répondre par notre avoir... Nous avons une femme, une famille, une maison, de beaux enfants... Mais cela ne colle toujours pas, et que dire de ceux qui n'ont rien ? Sommes nous notre histoire ? Mais nous sommes aussi nos rêves, nos aspirations. En creusant un peu plus nous pouvons être tenté de répondre que nous sommes nos pensées, plus précisément l'ensemble de nos pensées à savoir le mental, et le sentiment d'être fier de ces pensées est le propre de l'ego. Mais, avec un peu d'entrainement, on peut contenir notre mental et ne penser à rien pendant plusieurs minutes. Or pendant ce temps où le vide fait place aux pensées, notre être ne s'arrête pas, au contraire, nous sommes comme pleins de vie. On peut dire qu'il y a quelque chose qui correspond à cet espace infini qui nous représente. Cet espace est à la fois le contenant et le contenu du monde tel que nous le percevons... Ce lieu, cet espace est celui de la conscience.


Tout, absolument tout l'Univers tel que nous nous le représentons a sa place dans cette conscience. Que nous soyons érudits, ou parfaitement sots, l'Univers entier est englobé dans notre conscience. Dès que nous percevons quelque chose de nouveau, du grain de sable au continent entier, ce nouvel élément prend sa place comme si nous l"avions toujours connu. Cela vient sans doute du fait qu'en notre for intérieur, intuitivement, nous savons que l'Univers est dans un état et un seul. Aussi, toute chose tangible que nous percevons fait partie intégrante de l'Univers sans ambiguïté. Si nous avons pris conscience d'un fait par nos propres sens, celui-ci est indiscutable. Il n'en va pas de même, loin s'en faut, de ce que nous apprenons par une tierce personne... Il n'est pas rare en effet de tomber sur quelqu'un de malhonnête, qui travestisse la réalité, pour fanfaronner, ou suivre toute autre stratégie de son ego.


Ainsi, la conscience et le mental sont deux choses bien distinctes. L'une englobant l'autre. Ce qui est élaboré par le mental fait partie de la conscience. Dans la conscience, jaillissent des pensées, ou plus précisément des idées, qui ne sont que des germes de pensées, des flashs intuitifs. Le mental s'empare de ces idées pour en faire des pensées qui répondent à un certain désir. Le mental aime en effet se faire valoir, c'est notre ego qui est derrière tout cela. Et c'est ainsi que, pour se faire remarquer, il va créer des pensées spectaculaires. Typiquement, il va élaborer un scénario catastrophe. Par exemple si nous pensons à nos clefs de voiture qui sont bien rangées au fond de notre poche, notre mental va imaginer que ces clés auraient pu disparaître par un trou dans la poche, ou tout simplement que nous aurions oublié de les prendre. Et comme notre plus vif désir est de ne pas avoir oublié nos clefs, nous réagissons en vérifiant fébrilement le contenu de nos poches, et nous vérifions même que celles-ci n'ont pas de trou. Ainsi, le mental a fait naître en nous le désir de vérifier que tout était en ordre vis à vis de nos clefs. Si nous observons la façons dont fonctionne notre mental, nous sommes surpris des scénarios catastrophes qu'il élabore. Si nous pensons à nos prochaines vacances à la neige, notre mental ne manquera pas de nous mettre en garde de bien prendre nos chaînes, sinon, nous risquons de nous enliser, il nous fera remarquer aussi que nous devrions nous entraîner à les poser. Ainsi, les scénarios les plus catastrophes sont envisagés, alors que la réalité sera forcément différente.
Dans le cas des clefs par exemple, nous n'aurions pas du nous inquiéter, et rester imperturbable. Or il existe un lieu où cette quiétude existe. Ce lieu n'est pas celui du mental, mais de la conscience. La conscience est en amont de toute pensée. Si nous nous disciplinons, pour laisser filer nos idées, et ne pas nous y attacher, nous devenons juste observateur de nos idées et embryons de pensées, et peu à peu, un calme, une quiétude s'installe, les pensées s'évanouissent, un vide prend place dans la conscience, ce qui est paradoxal puisque nous avons dit que notre conscience était un espace infini rempli de tout l'Univers. Sans pensée, notre conscience devient sereine, elle ne désire plus rien, elle ressent une infinie complétude : la joie d'être. Cette joie est auto-suffisante. Une vraie bénédiction. Comparée au vacarme du mental, c'est un vide qui nous ressource.


Or qu'avons nous fait ? Nous sommes passé d'un mode de pensée lié au cortex de notre cerveau (la matière grise), à un mode de pensée lié à notre cerveau reptilien. Nous sommes passé d'un mode de pensée rationnel à un mode de pensée intuitif. Ainsi, notre conscience devient intuitive, informée des événements dans l'instant et libérée des entraves du mental, Elle nous rend prêts à interagir avec ces événements. Cette pure conscience est libérée de tout désir. De tout désir de possession, de tout désir d'influence, de tout désir de projection... Ainsi, son action n'est rien d'autre que de suivre le fil des événements, c'est ce que Lao Tseu appelle le non-agir. Aucune préméditation ne vient altérer l'acte. Aussi, il faut lâcher prise de tout désir, de toute attente, jusqu'au moment où l'acte devient spontané, il coule de source...

La conscience est cet espace vide de pensée, plein de tout l'Univers.


vendredi 13 novembre 2015

Du Désir à la Joie : 4 : Le mental


Du Désir à la Joie : Chapitre 4 : Le mental


Il y a dans notre tête une petite voix qui parle, on ne peut ni hausser ni baisser le volume de cette voix. Si nous nous identifions à elle, c'est qu’étant la notre, elle est forcément la voix de la raison ! Comment pourrions-nous avoir tort dit l'ego? Ces raisonnements que fait la petite voie pour nous à longueur de journée, c'est ce que l'on appelle le mental. Nous pensons que cette petite voie fait partie intégrante de nous-même, qu'elle a toujours été là pour nous aider, nous accompagner. Pourtant, quand nous étions nourrisson, nous n'avions pas encore le langage ! Pas de parole, pas de voix ! 
Il est intéressant d'observer que les animaux n'ont pas un cortex assez développé pour élaborer le langage. Sans doute n'on-t-il pas cette petite voix comme compagnon ? Et sans doute est-ce ce qui explique que la folie soit si peu développée dans le règne animal, et si importante chez l'humain. Or le langage est symbolique, il ne retranscrit qu'une infime partie de la réalité. Par exemple, si je dit un "chat", je ne sait rien de sa couleur, de la longueur de ses poils, de son odeur... Pourtant, si j'observe ce chat, je peux connaître, ou mieux, ressentir toutes ces choses. On voit donc la différence entre le mental et l'expérience directe.

Pourtant cette petite voix effectivement nous rend dingue ! Que fait-elle ?


Parfois, elle nous remémore des événements du passé. Ce faisant, elle nous plonge dans une certaine mélancolie, car le passé était en général mieux. Et puis, par ces évocations du passé, elle nous sort de l'instant présent, qui est l'unique lieu de la vie. Elle peut aussi imaginer l'avenir, et souvent, elle cherche le spectaculaire. C'est pourquoi elle imagine des scénarios catastrophe, tant elle est consciente du fait que plus son intervention est digne d'intérêt, plus elle aura gagné en attirant notre attention. C'est ainsi qu'elle nous extrait également de l'instant présent. Et dans le présent que fait-elle ? Eh bien, parfois, elle nous accompagne dans notre tâche, comme pour moi par exemple quand j'écrit ces lignes. Idem lorsque nous suivons une recette de cuisine. Dans l'action, souvent le mental se concentre sur la tâche, ce qui calme son activité. Mais, ce n'est pas toujours le cas. Par exemple, lorsque nous conduisons sur la route, il n'est pas rare de nous demander : "quel chemin ai-je pris durant les dix dernières minutes ?" Si nous essayons de nous en souvenir, c'est impossible ! Par contre les dernières vacances au ski que vient de me remémorer mon mental durant ces dix minutes, ça je m'en souvient. Dangereux non ?


On le voit, lorsqu'elle est décalée de l'instant présent, l'action du mental est plutôt de nature à parasiter notre vie. Elle handicape en effet notre capacité d'action et d'attention. Or certaines personnes ont un mental hypertrophié. Souvent, elles veulent bien agir, mais en pensant à autre chose, elles font tout de travers, le stress grimpe, et ces personnes sont malheureuses. Mais elles veulent quand même bien faire, alors elles chargent un peu plus la mule, et le mal-être ne fait que croître ! Derrière cette attitude se cache le désir de bien faire. Ces personnes cherchent à résoudre le problème en donnant toujours plus d'elle même, alors que ce qui résoudrait leur problème serait de lâcher prise, de se tourner un peu plus vers elles-mêmes, et de voir avec calme ce qui peut être fait dans l'instant.

Le stress est un peu comme la partie émergée de l'iceberg des troubles que peut déclencher l'hyper-activité du mental. En effet, un mental envahissant est souvent la cause de troubles psychiques c'est certain, mais aussi la cause de nombreuses maladies. Vous me direz, quel rapport peut-il y avoir entre une activité mentale et un dérèglement purement physique ? Et bien là il faut introduire quelques notions d'anatomie du cerveau. Celui-ci se décompose en trois parties : le cerveau limbique au centre, le cerveau reptilien en dessous (connecté à la moelle épinière) et le cortex qui coiffe le tout. Souvent, on parle d'activité cérébrale pour qualifier le rôle du Cortex, comme si les deux autres cerveaux ne jouaient aucun rôle. Et bien, l'activité du Cortex c'est justement le mental. Que fait le cerveau limbique ? Il est le siège de nos émotions (la peur, la lassitude, la joie, la frustration, la déception...). Et le cerveau reptilien ? C'est le cerveau le plus archaïque en ce sens que nous l'avons en commun avec les reptiles qui étaient les premiers à peupler la planète. Le rôle de ce cerveau est de nous fournir un certain nombre de réflexes, Il nous dote des instincts de survie, mais aussi de l'intuition. Un rôle important est celui de régulateur. C'est lui qui régule la température, la circulation des fluides... Lorsque nous ne faisons pas attention, c'est lui qui règle le rythme respiratoire (il est intéressant de constater que la respiration est le seul flux sur lequel le cortex peut avoir de l'influence).


Même si le rôle de chacun des cerveaux est bien défini, il ne faut pas croire qu'il n'y ait aucune influence de l'un sur l'autre. Et notamment, lorsque le cortex est hyper-activé par le mental, les deux autres cerveaux sont perturbés dans leur fonctionnement, avec pour conséquences, une augmentation de l'émotivité due à la perturbation du cerveau limbique, et un dérèglement des organes du corps dus à la perturbation du cerveau reptilien. Ceci étant la cause de nombreux dérèglements pouvant facilement générer des maladies.

Pour contrecarrer les désagrément d'un mental hyper-actif, il est un remède très efficace : la méditation. En effet, en méditation, on apprend à "éteindre" le mental. On le fait petit à petit, en le calmant par la concentration (par exemple sur la respiration), en l'observant, et en laissant filer les pensées, et finalement en l'éteignant pour quelques minutes. Dès lors, on est en contact avec les intuitions du cerveau reptilien. D'où viennent ces intuitions ? C'est quelque peu mystérieux, mais elles n'ont rien à voir avec les constructions du mental. En étant coutumier de la méditation, on finit par vivre au quotidien sur un mode intuitif, laissant de côté l'action du mental. Or le mental, c'est celui qui désirait pour nous. Vivre sans mental, c'est vivre sans désir. Et l'intuition qu'on attendait pas, qu'on ne désirait pas, nous apporte la joie de la découverte, exactement comme lorsque nous étions petit enfant.


La santé physique et mentale, c'est le non-mental, le non-désir.

vendredi 6 novembre 2015

Du Désir à la Joie : 3 : Le Non-Désir


Chapitre 3 : Le Non-Désir


Une fois enfermé dans la spirale du désir, nous n'avons pas d'autre solution que de freiner ces désirs. Le père du Taoïsme Lao Tseu va même plus loin, il parle de Non Désir, ce qui signifie se libérer du désir, exactement comme le conseille Bouddha pour accéder au Nirvana. Le mécanisme du désir tient du cercle vicieux, car le désir maintient l'homme ordinaire dans un espoir de vivre mieux dans le futur. Cet espoir est plaisant pour l'ego. Si bien qu'une fois l'objet du désir atteint, le plaisir ne durant pas bien longtemps, l'ego propose un nouvel objet de désir pour ne pas faire mourir ce qui le nourrit. Pour en sortir, le non-désir est une solution audacieuse mais très efficace. Elle est audacieuse car parvenir au non-désir revient à vaincre notre Ego. Par exemple si l'objet de notre désir est une séduisante jeune fille, il nous faudra mettre de côté les techniques de séduction propre à l'ego et séduire celle-ci par notre naturel et avec humilité. Je ne doute pas que cette dernière méthode sera plus efficace...

Aussi, si pratiquer le non-désir permet de vaincre l'ego. Pratiqué avec zèle il permet même de limiter l'activité du mental, en effet l'activité mentale tourne très souvent autour du désir. Par exemple si nous désirons acheter une nouvelle voiture, nous imaginons tout ce que nous pourrions faire avec ses nombreuses options, et de fait nous rêvons en plein jour. Cette activité mentale tournée vers l'objet du désir nous empêche de vivre pleinement l'instant présent. Or c'est dans cet instant que se joue le cours de la vie. Suivre les désirs c'est donc s'extraire de la vie. Celle où les actes ont un poids. Sans désir et avec un mental au repos, nous ne quittons plus l'instant présent. Ce que nous entendons par mental au repos, c'est un mental qui n'est ni axé vers le futur, ni penché sur le passé, mais un mental concentré sur le présent. Cette concentration du mental est celle que nous observons par exemple lorsque nous travaillons à une tache nouvelle et délicate comme lorsque nous montons un meuble en kit. Là, le mental s'avère nécessaire, mais comme il est plongé dans l'instant présent, il s'avère fructueux : le meuble est monté... Il faut veiller cependant à ne pas nous enorgueillir du résultat et ne pas gonfler notre ego !


Attention, le désir est partout ! Lorsque nous cueillons une fleur, le désir est de sentir son parfum ou de faire un bouquet. Lorsque nous cassons des œufs, le désir est de faire une omelette. Lorsque nous sommes au feu rouge, le désir est que celui-ci passe au vert. Lorsque nous ouvrons le placard à biscuits, le désir est de trouver quelque chose à grignoter... La liste est sans fin ! Vivre sans désir, cela ne consiste pas à s'arrêter de vivre toutes ces choses, mais c'est de ne rien attendre. Si la rose n'a pas une odeur de rose, peu importe, nous profitons de ce parfum nouveau. Si l’œuf s'écrase au lieu de se casser, nous ne nous mettons pas en colère, il est bon pour la poubelle, peu importe, le suivant se cassera mieux. Si le feux rouge s'éternise, nous profitons du paysage qui s'offre à nous. Si nous ne trouvons rien à grignoter, cela sera bon pour notre régime. Nous accueillons les choses qui arrivent sans nous énerver avec une humeur égale et plutôt joyeuse.

Parmi la multitude de désirs, il en est trois dont il est terriblement difficile de se départir : les drogues, le sexe et la nourriture. Il faut une foi sans faille pour se départir de ces trois objets de désir. Pour se rendre compte qu'on est assujetti à un désir, il faut en observer le mécanisme et donc prendre un peu de recul. Le lieu où ce recul s'avère possible est ce que nous appelons la conscience. Apprendre à se servir de notre conscience est d'une importance capitale. En effet, lorsque nous prenons conscience du mécanisme du désir, celui-ci est pratiquement déjoué. Ainsi, il s'agit d'être les témoins de nos désirs. Pour les addictions dont nous avons parlé plus haut, il faudra  déjouer nos désirs sans relâche à la lumière de notre conscience, et petit à petit, elles seront vaincues.


Ne rien attendre et prendre conscience de ses désirs pour les vaincre, telle est la voie du non-désir.

Avec le temps, pratiquer le non-désir devient une habitude. La conscience est le témoin de nos actes, et elle sonne le signal d'alarme lorsqu'un désir tente de se mettre en place. En retour, nous nous plaisons dans une attitude de non-désir, de non-attente, "nous n'attendons rien". Cette attitude est très puissante, car elle nous concentre sur l'instant présent. Instant qui devient le lieu d'un étonnement sans cesse renouvelé, car sans attente, ce qu'apporte l'instant est une perpétuelle découverte. Nous accueillons cet instant avec joie. Il faut bien comprendre que comme il n'y a pas d'attente, ce qui est vécu paraît plus beau, merveilleux même. Les diverses traditions le décrivent bien : après l'Eveil, le monde semble transformé, et pourtant rien a changé.

Ceci est de nature à nous mettre en joie.

On peut aussi dire que notre regard cesse d'être prédateur. Lorsque l'on porte son attention sur un objet, il n'y a pas de jugement de valeur, il n'est ni beau ni laid, ni grand ni petit, ni clair ni sombre... Simplement, il est dans sa perfection ! Il n'est en tous les cas pas question de le faire notre. Car si cette envie existe encore, c'est que notre regard est toujours le regard prédateur du désir.
Sans désir, on apprend à s'émerveiller de tout. Tout, même les choses simples, et peut-être encore plus les choses simples, deviennent objet de complétude, l'Univers qui nous entoure nous comble de bonheur, nous comble de joie. Il a suffit pour cela de mettre de côté notre attente, de cesser de regarder l'Univers avec l'œil d'un prédateur.

Autrement dit, pratiquer le non-désir nous permet de ne pas passer à côté de la réalité de la situation dans laquelle nous nous trouvons. Nous faisons corps avec l'ici et maintenant tel qu'il se déroule. Nous ne nous battons pas avec le cours des choses parce que nous ne l'avons pas désiré autre. Se départir de nos fortes attentes est une chose, mais nous départir des petites attentes du quotidien est autrement plus difficile ! Car nos réactions sont encrées dans la routine. Dans telle situation, nous avons pris l'habitude que telle chose se produise. Cette habitude est une forme d'attente donc de désir. Non, comme le dit Lao Tseu, nous devons être comme le nouveau né, sans savoir de quoi l'avenir proche sera fait. Et ainsi, la routine, au lieu d'être source d'ennui devient source d'émerveillement.

Le non désir est la clé d'une vie joyeuse.

Le Non-Désir : Mon seul désir.

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