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vendredi 21 juillet 2017

Non solitude


Moi seul vais comme le déshérité dit Lao Tseu.
Tellement peu de gens suivent le Tao, comment ne pas être seul ? Seul a être le digne représentant de l'Univers. Autour de soi vont et agissent de multiples Ego: "moi je suis allé en Grèce pour ces vacances, et toi tu as fait quoi ? - Moi j'ai suivi le Tao !" Non bien sûr, on ne peut pas répondre ça! Alors forcément, on reste un peu en retrait, et on savoure l'expérience du Tao en solitaire. L'homme du Tao est bien sûr attentif aux autres, mais il est aussi tourné vers l'intérieur à l'écoute de cette vacuité qui le guide. Et ce trésor, il ne peut le partager avec autrui. Car même si il essaye, il se heurte à une levée de boucliers ! "Non, je ne crois pas au Tao", sous entendu : "c'est moi qui décide, pas le Tao".
Lao Tseu, lui, s'est retiré dans les montagnes de l'ouest. Mais était-il vraiment seul ? Non ! Car il était plus que jamais connecté au Tao, connecté à l'Univers lui-même. Ainsi, le Tao s'il nous coupe du vulgaire, il nous relie à tout le reste. La solitude dans laquelle se trouve le Taoïste est donc toute relative, c'est une Non-Solitude. Et puis, lorsque l'homme du Tao croise un être spirituel, la complicité est telle qu'elle vaut plusieurs rencontres. De plus, les grandes discussions entre amis ne sont pas très compatibles avec le Tao, car ce dernier réclame une attention non polluée par le mental, et lors d'une discussion entre amis, le mental est en effervescence cherchant à alimenter la discussion pour "faire l'intéressant". Faire le fanfaron, voilà le propre des discussions entre amis, tous le contraire de l'attitude naturelle du Taoïste qui reste humble en toutes circonstances
Communiquer avec autrui sur le sujet du Tao nécessite d'être seul à seul. Il n'est déjà pas facile d'aborder le sujet en privé, l'aborder en groupe est pour ainsi dire suicidaire et dans tous les cas fort maladroit. En tête à tête, si le sujet est quelque peu enclin à la spiritualité, c'est jouable, surtout si c'est lui qui aborde le sujet. Or il se trouve que le Taoïste est d'ordinaire ouvert à ce type de discussion, et si l'interlocuteur le ressent alors la brèche s'ouvre, et c'est gagné, l'échange peut avoir lieu.
J'avais un oncle spirituellement très ouvert qui me disait qu'il recueillait souvent les confession des gens. D'après lui, après avoir discuté de la pluie et du beau temps, il suffisait de baisser la main droite à plat un peu à la façon des saints sur les icônes pour que l'autre se répande en confession. J'ai testé, et j'y suis arrivé une fois ou deux, mais lui n'avait pas son pareil pour le faire.
La solitude que le Taoïste ressent tient aussi au contraste qui existe entre la richesse de la vie intérieur et la pauvreté des échanges avec nos semblables. Le Taoïste étant sans désir s'en accommode très bien, mais se tourne dès qu'il le peut vers sa richesse intérieure. Du reste, l'homme sans désir se satisfait très bien de la solitude quelle qu'elle soit. Celle-ci est pour lui objet de méditation et lui procure paix, joie, plénitude et sérénité.
Mon premier souvenir remonte à une époque où j'étais très jeune, peut-être 1 ou 2 ans. J'étais dans mon berceau et je scrutais la pièce tout autour de moi. Celle-ci était blanche, immaculée. Je ne distinguais pas bien la porte, blanche elle aussi,
mais je savais que l'objet de mon attente (ma mère) devait venir de cette direction. Dans cette pièce j'étais seul, mais pourtant je me sentais relié. Pas à ma mère, car elle n'était pas là. Mais j'étais calme et serein, une force tranquille m'accompagnait, elle m'aidait à supporter ma solitude. Aujourd'hui, je crois que je peux l'identifier comme étant celle de ma conscience.
Le Taoïste a pour compagnon sa propre conscience, grâce à elle, il n'est jamais seul.  

vendredi 14 juillet 2017

Inspiration

Le Tao est une source d'inspiration infinie. Il était là bien avant notre naissance, et il perdurera après notre mort. Suivre le Tao, c'est tenter de prendre son point de vue. Un point de vue non ego-centré, un point de vue neutre. Mais on ne peut jamais prendre parfaitement ce point de vue, à chaque fois on échoue, non sans en avoir retiré quelque leçon de sagesse. C'est pourquoi il est une source infinie d'inspiration. Quand on parvient à prendre le point de vue non duel du Tao, on perçoit le monde d'une façon merveilleuse, on conçoit que l'on est pas là pour vivre sa vie de façon égoïste, mais pour apporter notre point de vue à l'Univers, et cette tâche est la plus noble qui soit. Par notre vie, nous faisons un état des lieux pour l'Univers, nous le renseignons sur ce qu'il devient, nous sommes ses membre sensibles, ses mains, ses yeux, ses oreilles, son nez, sa bouche. 
Nous ne sommes pas seuls à pouvoir suivre le Tao, les animaux et d'une manière générale tous les êtres sensibles en sont capables. Songez au témoignage que rapporte à l'Univers, un papillon en train de butiner des fleurs ! C'est le point de vue de l'Univers sur lui-même qui est fabuleux. On assiste à une forme de transcendance. Car à travers nous, c'est le Tout qui se regarde, qui s'observe, se rassure. Prenez un point de vue égoïste et toute la magie disparaît, fini le grand frisson de l'Univers. C'est tellement vrai que certains passent leur vie sans jamais avoir ressenti ce grand frisson. Ce dernier est comparable à la complétude que l'on ressent lorsqu'on est amoureux, mais faire l'amour avec et pour l'Univers remplit encore plus de plénitude et nous traverse de joie instantanément.
Cette orientation positive qu'est le Tao nous laisse un point de vue original souvent paradoxal que les autres n'ont pas. Lao Tseu est de ce point de vue tout à fait remarquable, traduit des  centaines de fois, son oeuvre donne naissance à des centaines d'interprétations différentes. C'est que le Tao est au cœur de chacun et se livre donc de mille et une manière. Toujours précis, actuel pour tous, et ce depuis plus de deux millénaires.
Nous avons un destin individuel, mais nous oublions trop souvent que notre destin
est commun avec celui de l'Univers. Il est donc bien sur indispensable de le préserver, comme nous tentons de préserver notre vie. Les préoccupations écologistes sont donc primordiales. Le bien-être des animaux et des êtres sensibles l'est également. Etre Taoïste c'est donc être autant que faire se peut, végétarien et défenseur de la planète.

Ainsi, j'ai choisi le Tao, ou plutôt le Tao m'a choisi. D'autres se tournent vers eux-même à travers Dieu et la prière. Il n'est pas surprenant de constater que les fidèles nous disent que leurs prières sont sources d'inspiration. C'est l'introspection vers une forme de transcendance qui est source d'inspiration. Qu'on la nome Dieu, Vacuité ou Tao n'importe guère, il est temps que les hommes se réunissent autour de cette transcendance.  

jeudi 6 juillet 2017

Sensibilité


On pourrait croire que Non-Agir et Non-Désir riment avec austérité et froideur, que l'homme qui suit le Tao agit sans discernement, que c'est un robot, une marionnette répondant aux ficelles de la destinée. Après tout, sa vie est écrite puisqu'elle se calque sur celle de l'Univers. On pourrait croire que cette "routine" lui assure une vie certes sereine, mais sans surprise, sans émotion. Et bien non, non contant de ressentir encore des émotions, le Taoïste ne ressent presque plus que les émotions positives que sont la joie, l'amour, la paix, la sérénité, la compassion. Plus de peur de colère ou d'agressivité quelconque car il a foi dans le Tao. 
Et les émotions positives comme les larmes de joie sont décuplées. Avant de comprendre les paroles du Tao Te King, j'étais très peu sensible au bonheur, je ne pleurai jamais, ni de joie ni pour me
plaindre. Depuis que j'ai goûté au Tao, je pleure comme une madeleine dès qu'il est question de guerre ou d'amour. Mes larmes sont des larmes de joie ou de compassion. D'ailleurs ma première lecture du Tao Te King s'est accompagnée d'une émotion positive qui m'a totalement bouleversé, j'ai pleuré à chaudes larmes.
Ainsi, l'homme du Tao est sensible, sans doute plus sensible que l'homme ordinaire. Et cela s'explique en partie par sa connexion instinctive au Tao, il est en communion directe avec l'univers : pas de cogitation, de réflexion sur ce qu'il éprouve, son cerveau va droit au but. Il est touché en plein cœur.
Aussi, le fait d'être dépourvu de "moi" le rend plus tourné vers l'extérieur, l'antenne est plus grande, plus apte à rentrer en résonance. 
Cette sensibilité accrue agit comme une sorte de récompense pour celui qui l'éprouve. Il y a quelque chose qui tient d'une joie permanente dans ce qui meut l'homme du Tao. Et c'est sa compassion pour l'humanité qui lui apporte l'amour
nécessaire à l'entretien de sa joie. D'ailleurs sa compassion ne s'arrête pas à l'humanité, elle s'étend à toute la planète, il est défenseur de la cause animale et agit pour l'écologie. Tout cela lui parait évident, aussi agit-il dès que possible (Non-Agir).
Et c'est parce que sa compassion englobe tout, parce qu'elle est sans faille qu'il est un digne représentant anonyme de l'Univers. Nous ne sommes qu'une partie vivante et sensible de l'Univers, mais c'est déjà une énorme responsabilité. Nous sommes reliés au Tout, nous ne sommes pas séparés, mais vibrons et sommes sensibles envers ce Tout, pour peu que nous ayons mis de côté notre ego.
S'éveiller procure une sensibilité accrue.

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