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dimanche 25 octobre 2020

Simplicité

 
 
Lorsque l'on s'avance sur la voie, le Tao, on accède peu à peu au bonheur. Mais ce bonheur n'est pas artificiel. On n'y accède pas par je ne sais quelle expérience mystique, ce n'est pas un plaisir comparable à l'abus de quelque substance illicite. C'est juste là, un bonheur simple. On ressent une plénitude, on est comblé par rien, car ce rien devient tout.
Ayant abandonné toutes les richesses, on se fond avec le Tao, et le Tao n'a besoin de personne pour évoluer. Aussi, nous n'avons besoin de personne pour vivre. La corne d'abondance qu'est le Tao y pourvoit. Je n'ai pas vécu au Sahel mais je me dis que même dans ces contrées africaines difficiles le Tao est présent, et il pourvoit au bonheur de ceux qui se contentent de peu.
Le rien devient tout. En effet, on se contente de rien, mais le Tao est toujours là et avec lui l'évolution du tout : la vie. Une belle demeure est la propriété de celui qui la regarde dit-on, eh bien le Tao c'est
pareil, il est à la portée de nous tous, il suffit de lâcher prise des biens, des passions, du savoir... Ce qui reste est infime, mais c'est suffisant pour vivre heureux.
Car le paradoxe est là, comme le simple jouit du bonheur de contempler une belle demeure, le simple jouit également des relations avec les autres mais sans la passion, et il retient ce qu'il a vécu dans l'instant présent (savoir suprême). Ainsi, paradoxalement il jouit des biens, des passions et du savoir bien mieux que quiconque qui s'y attacherait !
Et la personne qui vit dans ce rien est à l'abri de bon nombre d'attaque. Qui se soucie de rien ? 
C'est pourquoi le bonheur du Taoïste est simple, mais ne se partage guère. Lorsque deux taoïste se rencontrent, pensez-vous qu'ils sondent la profondeur de leur rien ? Non, ils profitent l'un l'autre en silence du Tao et ne se disent rien.
C'est pourquoi le Taoïste est d'ordinaire solitaire. Comme un Tchouang Tseu, il lui arrive des tas de
choses, mais il les partage avec peu. Le récit est pour lui la meilleure façon de porter témoignage. C'est ce que le garde barrière de la passe de Chine occidentale a demandé à Lao Tseu et qui a donné vie au Tao Te King. Ce livre est né en une nuit d'écriture. Et en toute simplicité, Lao Tseu a décrit ce paradoxe qu'est le Tao. C'est dire à quel point, Lao Tseu était parvenu à se fondre avec le Tao, à quel point sa vie avait la simplicité du bonheur. Et le Tao l'emmenait d’orient en occident... En toute simplicité. Heureusement que le garde barrière a fait à Lao Tseu cette requête d'écrire un recueil, car sans lui, la notion de Tao serait restée lettre morte. Aussi, comme c'est toujours le cas, le Tao était autant chez le garde barrière que chez Lao Tseu lui-même.
Le Tao est l'école de la simplicité, du dépouillement. Ce qui ne veut pas dire ascèse car le Taoïste jouit de la vie sans doute encore plus qu'un épicurien car il n'en retire rien, il ne s'y attache pas, ce qui lui permet d'en jouir encore et encore en toute simplicité.    

samedi 17 octobre 2020

Instant présent

 
 
Qu'on le veuille ou non, tout ce qui se fait se fait dans l'instant présent. L'action se conjugue au présent, les tergiversations de notre mental sur le passé ou sur l'avenir sont souvent chronophages et nous empêchent de profiter du présent pour agir. 
Alors bien sûr vous pouvez profiter de votre intellect pour élaborer un plan d'action. Mais qui vous garantit que ce plan sera en accord avec votre entourage, qui vous garantit que ce plan sera favorable à l'environnement ? C'est vous qui essayez de tenir compte d'un maximum de paramètres pour agir au mieux. Mais si vous planifiez votre semaine de travail, vous savez que des éléments peuvent changer en fonction de la réaction de telle ou telle personne. 
En ce moment, avec le Covid19, ma directrice prévoit des cours en distanciel pour la rentrée, elle va même jusqu'à prévoir des surclaviers pour les claviers d'ordinateur en TP. Mais qui nous dit que la situation n'aura pas évolué dans un sens ou dans l'autre d'ici septembre ?
Aussi, en imaginant l'avenir ou en ressassent le passé, on peut se tromper, et l'action dans le présent
est peu efficace. Mais le pire est que dans le temps où notre intellect élabore ses stratégies, ou revisite le passé, pendant ce temps, nous sommes coupés de l'instant présent. Nous ne sommes plus attentifs à l'évolution du monde qui nous entoure, nous ne pouvons plus profiter des conseils subtils du Tao.
Pire, lorsque vient pour nous le temps de passer à l'action et de dérouler notre plan, étant peu en phase avec notre entourage, nous allons souvent d'échecs en échecs. Et nous essayons de faire de nouveau appel à notre mental pour nous en sortir, répétant à l'infini la même erreur.
Le Saint Homme de Lao Tseu ne fait pas ces erreurs, son esprit est calme comme la surface d'un lac sans vent. Il est attentif à ce qui advient. Si nécessaire (si sa perception du Tao l'y encourage) il entre e
n action, mais sans calcul, instinctivement. Et son action étant fidèle au Tao elle est efficace et perdure. Bien entendu, notre Saint Homme ne s'accapare pas les bénéfice de son action, au contraire il s'efface, garantissant ainsi la pérennité de ces résultats.  
Ainsi le Saint Homme agit en faisant confiance, non pas à son intelligence, mais en l'intelligence du Tao. Il s'en remet définitivement à lui. Et pourquoi le Tao est-il plus intelligent que nous ? Tout simplement parce qu'il est le fondement de l'intelligence. Il est le fondement de la nature, le fondement de la vie. Et cette nature vivante trouve toujours une échappatoire à chaque situation. Le bénéfice n'en est pas toujours clair. On peut penser par exemple à un accident de la circulation mortel. Mais, de tels accidents ne résultent-ils pas du non respect caractérisé de l'équilibre naturel qu'est le Tao.
Le Tao, lui assure l'évolution des espèces, il garde ce qui fonctionne. Tandis-que ce qui ne fonctionne pas dépérit. Et le lieu où tout se joue, où l'on peut savoir si l'efficacité de notre Non-Action est réelle ou non, c'est l'instant présent.


samedi 10 octobre 2020

Savoir suprême

 
 
Non Désir, Non Agir sont deux qualités du Tao, qu'il est bon de suivre et dont Lao Tseu lui-même nous vante l'efficacité. Mais il est une troisième qualité moins connue mais au combien importante : le Non Savoir. Lao Tseu nous dit par exemple que le Saint Homme fait de son étude le Non Savoir. Il nous dit également que si il était le chef d'un petit village, il garderait les villageois simple, sans savoir.
Au premier abord on peut se questionner et même se demander pourquoi Lao Tseu a une attitude de dictateur gardant le savoir pour lui-même ?
Mais qu'est-ce que le Non Savoir ? S'agit-il d'abandonner ce que l'on nous apprend à l'école ? La réponse est oui et non. A l'école on apprend des choses et l'on apprend à apprendre en développant l'intellect et la mémoire. Cette démarche rend notre mental toujours plus actif, au point que ce mental apprend à s'emballer, n'ayant de cesse d'explorer notre mémoire. C'est cette activité qui est dénoncée par Lao Tseu, et non ce que nous avons pu mémoriser au cours de notre vie.
Ce que Lao Tseu nous propose c'est de demeurer simple dans notre rapport à la vie. Ne pas utiliser le
mental pour élaborer des stratagèmes souvent voués à l'échec ! Mais au contraire utiliser notre instinct ou notre intuition pour suivre au mieux le Tao, notre environnement.
Ce faisant nous allons vivre pleinement notre expérience du Tao, et nous allons par voie de conséquence mémoriser tout un tas de choses, et ces choses étant vécues en accord avec le Tao, en accord avec la vie, elles resteront gravées à jamais dans notre mémoire, c'est cela le Non Savoir.
Récemment, lors du confinement, certains de mes collègues ont manifesté le désir de changer de langage informatique pour nos étudiants, passant du C au Python. Un langage surtout informatique c'est un savoir. Comment l'aborder par le Non Savoir ? Eh bien j'ai abordé ce langage en trouvant par
instinct un cours sur internet aidé par mon fils bon informaticien pour l'installation des bibliothèques scientifiques, et j'ai suivi le cours pendant quinze jours alternant cours de Python et série Netflix pour décompresser. Au final, j'ai pu voir le potentiel de ce langage, et donc acquérir un savoir, et ce de façon quasi naturelle en suivant le Tao.
Ainsi, on peut voir que même les séries Netflix peuvent trouver leur place le long du fleuve que l'on nome Tao. L'instinct pour ne pas perdre le fil de l'instant présent est notre plus grand allié. Car c'est dans l'instant présent que tout se joue. Si vous disposez d'un grand Savoir, c'est que vous avez bien géré votre instant, à tout instant. Et si vous avez retenu chacun de ces instants, c'est que vous étiez en harmonie avec votre environnement. Malheureusement, à l'école, cette harmonie est trop souvent rompue, et l'on ne retient pas la leçon. D'ailleurs les bons pédagogues sont ceux qui savent captiver l'attention des élèves. On comprend pourquoi.

samedi 3 octobre 2020

La Vertu

 
 
On met une majuscule à Vertu pour bien distinguer la Vertu de Lao Tseu liée au Tao, des vertus traditionnelles liées au comportements humains : bonté, honnêteté, courage, droiture, prudence, générosité etc. Les philosophes traitent souvent des vertus, mai la Vertu de Lao Tseu c'est autre chose. C'est une attitude, celle de suivre le Tao qui rend vertueux. C'est en réalité un cercle vertueux, qui lorsqu'on s'y engage ne cesse de répandre ses bienfaits.
Celui qui suit le Tao est sans désir, il n'a aucune ambition de passer devant autrui, ce qui lui donne une humilité parfaite. Il ne tient pas à se mettre en avant, le mérite revenant au Tao lui-même, ainsi il efface sa personne, devenant de ce fait de plus en plus vertueux.
Celui qui suit le Tao est sans agir, il "surfe sur la vague du Tao", laissant à ce dernier l'initiative. Car le Tao, c'est le point immobile autour duquel se fait le mouvement. C'est dans cette immobilité que se tient l'homme "sans agir". C'est de cette force que Lao Tseu affirme que rien ne se fait sans elle. Celui qui détient cette force agit pour le bien de tous, avec Vertu.
La Vertu se love là où on ne l'attend plus. Ainsi l'ordre des choses voudrait que la force l'emporte sur la faiblesse. De fait dans la fable de Jean de La Fontaine, on pourrait croire que le chêne plus fort que le roseau l'emporte face à la tempête, mais il n'en est rien, faible mais souple, c'est le roseau qui
l'emporte.
Le Saint Homme s'efface et se place après le dernier. De cette position, il peut suggérer ce que lui souffle le Tao, et "agir" pour le bien de tous, avec Vertu. Pour le Saint Homme, il n'est pas question de faire des vagues. Diviser pour mieux régner est à l'opposé de sa pratique qui est d’unir, de pacifier, d'équilibrer. Le Saint Homme est prêt à tout donner (il ne possède rien). Ayant tout donné, il reçoit (du Tao). Ce qu'il reçoit, il le donne encore. Cette action est vertueuse car seul le Tao est une réelle corne d'abondance.
La Roue de la vie :
Un autre symbole est celui de la roue qui tourne grâce au vide qui est en son moyeux. L'homme ordinaire se maintient quelque part sur la roue et subit la vitesse de rotation et les chaos de la route. A l'inverse l'homme qui suit le Tao, poussé par la Vertu, fait son chemin vers le centre, vers son centre. Ce qu'il y découvre c'est le vide libéré des pensées. Alors, il se réfugie en ce vide, et peut, comme les rayons de la roue, rayonner dans de multiples directions.
Ce chemin vers le centre, c'est le Tao lui-même, et l’auréole qui l'accompagne est la Vertu. On aurait pu croire que le chemin de la sagesse est ardu et réservé à une élite. Mais il n'en est rien, car la Vertu guide et accompagne l'homme du Tao. Sans doute faut-il avoir souffert pour ressentir l'appel du Tao. Mais qui n'a jamais souffert dans sa vie ?   

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