Language

samedi 26 octobre 2019

Satori



J'emprunte le terme de Satori au Zen japonais. C'est un juste retour des choses car le Zen japonais vient du Tchan chinois qui lui-même vient du mariage du Tao chinois et du Bouddhisme indien ! Ainsi, le Satori est une brève mais décisive prise de conscience. Les japonais qui ont tendance à tout relativiser (ce qui est une qualité) disent du Satori : "avant le Satori, les fleuves sont des fleuves, les montagnes sont des montagnes, pendant le Satori, les fleuves ne sont plus des fleuves, les montagnes ne sont plus des montagnes, après le Satori, les fleuves sont de nouveau des fleuves, les montagnes sont de nouveau des montagnes." Les japonnais indiquent par là que la prise de conscience s'inscrit dans un temps relativement court pendant lequel l'Univers est transcendé.
Il existe plusieurs sortes de Satori, sur lesquels on ne peut pas toujours mettre de mot. C'est une expérience qui se vit individuellement. J'en ai personnellement vécu des petits comme le rôle du Non-Désir puis, bien plus tard, le rôle du Non-Agir.  Et j'en ai vécu un grand avec une vision du "Bouddha Bleu". Une caractéristique de ces Satoris est qu'ils se font malgré vous. Vous êtes certes dans un état d'esprit favorable, mais la révélation vient soudainement sans que vous vous y attendiez. C'est comme
un don du ciel. Après ma vision du Bouddha Bleu, les fleuves n'étaient pour moi, clairement plus des fleuves, et les montagnes plus des montagnes. Il m'a fallu plusieurs semaines pour m'en remettre ! La vision en elle même courut sur une soirée. Avec  des effets de vague (petites visions) tout le weekend.
Le Satori vous révèle une vérité d'une manière bien différente de la leçon d'école. Car cette leçon vient de vous-même, de la vérité qui est au plus profond de vous. Cela vient de la vérité qui est en vous et qui n'est autre que le Tao. Cette vérité vibre jusqu'au fond de vous même, et voilà pourquoi elle a un impact décisif. En un mot : le Satori. 
Nombre de ces Satoris sont venus pour moi de lâcher-prise successif. On l'a souvent dit, le Tao opère par un retour à l'équilibre. Aussi, lâcher prise de ses propres croyances permet au Tao de vous montrer la vérité dans toute l'humilité qui accompagne l'apprenti Taoïste. Après un Satori, la connaissance est ancrée d'une façon quasi irréversible, car le Tao est Un et il ne peut en être
autrement. Cette connaissance rejoint alors la connaissance Universelle. Et il faut une bonne dose d'humilité pour ne pas être tenté de faire du prosélytisme. Ceci n'est possible que lorsque l'ego a disparu et qu'il s'est dissout dans le bonheur de vivre par le Tao.
Le Satori n'opère pas sur l'homme ou la femme égotique, et c'est tant-mieux car la révélation risquerait d'éblouir de façon dommageable la petite personne qui vit dans le refuge de son être. On le voit, l'esprit humain est bien fait. Il n'agit pas sur l'homme ordinaire, et il éclaire l'homme sans ego. Et l'homme libre n'est pas celui que l'on croit. Car même pourvu d'un ego,  l'homme doit au final se soumettre au Tao. Et celui du Tao possède la liberté du Non-Désir. Car le Tao, sans désir n'impose rien à l'Univers, en tous cas rien d'autre que le retour à l'équilibre.
Puisse de nombreux Satoris éclairer votre route !

vendredi 18 octobre 2019

Les biens matériels



Nous possédons tous des biens matériels : un stylo, un téléphone portable, un ordinateur, et pour certains une auto ou une maison. Nous nous attachons plus ou moins à ces biens. Il n'y a qu'à voir comme nous sommes dépités de ne pas parvenir à mettre la main sur notre stylo -mais où est-il donc passé ? - . Il n'y a qu'à voir notre mine si nous perdons notre téléphone portable ! Même chose si le disque dur de notre ordinateur plante. Comment supporter une rayure sur une voiture toute neuve ? Enfin, le locataire ne verra même pas le dégât des eaux en provenance de l'appartement du dessus tandis que le propriétaire n'aura de cesse que ce dégât soit réparé. On le voit, le propriétaire d'un bien matériel s'attache à ce bien au point que souvent sa vie en dépend. Et il va modifier sa vie en tentant de recouvrer son bien coûte que coûte !
Le Tao offre au sage une attitude bien différente. En effet, le sage ne s'attache à rien, il se libère de tout attachement. Et à fortiori des biens matériels. Ceci le rend particulièrement libre. Il est libre de tout attachement, mais aussi de tout désir. Ainsi, il
ne manifestera aucun souhait par rapport à tel ou tel bien nécessaire, il se contentera de l'utiliser pour parvenir à des fins qui ne sont pas les siennes mais celles du Tao, et cela tombe bien, car le Tao, comme lui, étant sans désir, il n'aura que peu de fois à intervenir, pratiquant ainsi le Non-Agir.
Mais l'attachement aux biens matériels n'est pas le seul à nous faire souffrir, nous sommes aussi attachés à nos proches. Ainsi, Tchouang Tseu fut fort affecté par le décès de son épouse. Pourtant quelques heures plus tard ces disciples voyaient notre ami Tchouang Tseu chanter et battre la mesure sur des écuelles comme si un événement heureux venait de se produire. C'est que Tchouang Tseu eut vite fait de relativiser les événements sans s'attacher à aucune sorte de forme. Sa femme n'étant plus, elle venait de rejoindre le sans forme qui était le sien avant sa naissance. Dès lors, pourquoi s'attacher à sa présence ou à son corps qui ont rejoint le sans forme.
On le voit le détachement du Sage peut aller très loin. C'est dans un total lâcher-prise que s'opère ce détachement. La seule chose à laquelle se rattache le Sage est le Tao, et ce dernier, étant sans désir et sans agir n'offre que très peu de prise. Ainsi, le Sage Taoïste se laisse filer au grès des courants de la vie, ne faisant rien d'autre que de favoriser les mouvements du Tao qui tendent à rendre à la vie un équilibre yin/yang toujours plus parfait. Dans ce cadre, la perte d'un bien matériel n'affecte que celui qui attachait de la valeur à ce bien, elle ne perturbe pas l'équilibre yin/yang de la vie.
De plus, le Tao et son retour à l'équilibre sont ainsi faits que si une action s'avère utile pour revenir à cet équilibre, le bien nécessaire sera mis entre les mains du Sage (ou de toute autre personne présente) , rendant ainsi son action spectaculaire. Ce qui distingue le Sage d'une autre personne c'est le fait que contrairement à ce dernier, il ne se ventera pas d'avoir fait une bonne action. Un exemple de ce type d'action est le sauvetage en mer à l'aide d'une bouée. Le Sage agira vite mais dans l'ombre. L'humilité caractérise le Sage et le Tao en général.
On peut tenir le même discours au sujet du Savoir, combien de gens s'y réfèrent et s'y accrochent ! "Le sage, lui, fait de son étude le non-savoir" (Lao Tseu).


samedi 12 octobre 2019

Le Un est Tout



Le Taoïsme est une religion non dualiste. Le Tao est dans Tout, Tout est le Tao. De ce fait il est facile de parler du Tao; il suffit de décrire n'importe quel objet ou n'importe quel être, mais la description n'est jamais totale car le singulier n'égale jamais le global. Il est facile de décrire une vague de la mer, mais il est impossible de décrire l'océan tout entier. Et cela est encore plus dur pour un poisson qui vit dans l'océan. 
Comme le poisson, pour la mer, nous vivons dans le Tao, il nous est donc presque impossible de ressentir le Tao ; nous n'avons rien connu d'autre. Cependant, nous sommes traversés par le Tao, et c'est dans notre intériorité que nous pouvons sentir cette étincelle, ce feu de vie qu'est le Tao. Ainsi, en pratiquant la méditation, il n'est pas rare d'être le témoin de ce dont est capable le Tao. Voyages à travers l'Univers, communication avec des sages,
vision de paysages merveilleux... C'est de cette manière que l'on peut se convaincre du bien fondé du Tao.
Dans les religions Judéo-chrétiennes, on essaye, et on parvient à communiquer avec Dieu, qui par exemple au travers d'Adam, de Moïse, ou mieux de Jésus ou encore Marie, sont présents dans notre intimité et nous permettent de nous connecter avec le divin. Avec le Tao, il n'est pas nécessaire d'établir cette connexion, car le Tao lui-même est la connexion vers l'essentiel.
Si Un est Tout et Tout est Un, alors chacun de nous, mais aussi chaque être, chaque objet est relié à l'autre par le Tao. Et comme pour l'océan, cette relation est presque imperceptible. Mais elle existe. Elle est d'autant moins perceptible que le Tao n'agit point et ne désire point. Il n'y a pas d'autre but que le notre ! C'est pourquoi, celui qui veut percevoir le Tao doit s'armer de Non-Agir et de Non-Désir. Dès lors, il s’apaise et rejoint le calme nécessaire et suffisant pour percevoir le Tao.
Si le Tao était doté d'un agir ou même du moindre désir, le monde tel que nous le connaissons serait transfiguré, car certains iraient à l'encontre de ce désir fondamental et s'épuiseraient. Sans désir, le Tao autorise à chacun de réussir. Mais le plus sage est encore de suivre le Tao en étant sois-même sans désir. Ne pas lutter, tel est le credo du Taoïste, d'ailleurs cette posture est celle des arts martiaux Chinois qui exploitent l'énergie de l'adversaire sans tenter de le contrer.
Pour l'individu que nous sommes, il est très difficile de bien comprendre ce qu'est la Non-Dualité, car il faut justement renier notre individualité pour espérer saisir toute la puissance du Tao. Par conséquent le Taoïste se fond dans la masse, en reniant ses désirs et en se défaisant de ses actes, il devient de plus en plus humble, au point de se défaire de son moi, de son identité propre, qui passe derrière tout le reste. Comme le dit Lao Tseu, la dernière place est celle du Taoïste. Et le miracle est que cette place n'est pas la plus inconfortable !   Sauf pour celui qui conserve un fort ego.
Aussi, vouloir quelque chose, se tendre vers un désir, c'est nager à contre courant dans l'océan du Tao. C'est contredire l'Unité de l'Univers. Au contraire, ne rien désirer, ne pas agir, c'est suivre les flots du Tao dans le grand océan de la vie.

samedi 5 octobre 2019

Harmonie



Tel un arbre majestueux aux longues branches au bout desquelles naissent des fleurs parmi les feuilles, le Tao est l'harmonie qui relie les êtres. Cette savante alchimie qu'est la nature fait naître l'harmonie de notre Univers. Les êtres et les objets sont faits pour s'harmoniser ensemble et non pour lutter les uns contre les autres. Telle est la leçon de vie que nous donne le Tao. Un lien commun nous unit et suivre ce lien nous offre une vie menée dans la perfection de l'art. Car le Tao n'a pas d'autre but que notre accomplissement notre épanouissement. Ainsi le Saint Homme sous ses aspects bruts est en parfait accord avec lui-même, avec la nature et avec son environnement, il incarne la perfection.
La perfection en matière de Tao n'est autre que l'harmonie. Chaque être joue sa partition, et s'il va dans le sens du Tao, cela sonne juste. A l'inverse celui qui lutte contre les êtres ou les objets va à l'encontre du Tao et cela sonne faux. Le Taoïste pousse l'art de s'harmoniser en pratiquant le non agir.
Ainsi, sa participation à la symphonie cosmique n'est autre que le silence, qui s'harmonise au mieux avec les notes de tous les êtres. Il ne va pas à l'encontre du flux cosmique, il lâche prise et suit aveuglément le Tao.
Occupé à suivre l'harmonie du Tao, il n'a aucun désir personnel. De la sorte, il ne peut se retrouver en contradiction avec le Tao, et sa partition est toujours juste. C'est pourquoi il participe volontiers aux projets petits ou grand de ses semblables et le fait en accordant le projet au Tao. Pour ce faire, il ne prend pas la direction ou le commandement, mais se met à la place du plus petit ouvrier du chantier. De la sorte il peut agir en profondeur, si nécessaire.
Prendre la dernière place est souvent la meilleure pour côtoyer le Tao.
Cette harmonie qui caractérise le Tao se concrétise souvent par une certaine transcendance ou devrait-on dire une transcendance certaine. Le fait que la dernière place devienne la première en est une simple illustration. Lorsque tout sonne juste, que votre partition est juste, les frissons ne sont pas loin ! La transcendance a des effets physiques psychiques et psychologiques. Cela se traduit par une
certaine joie, de la bonne humeur et favorise une bonne santé. Dans tous les cas (taoïste ou non taoïste) le Tao vous gratifie pour votre juste contribution à la symphonie cosmique, alors autant le faire consciemment, en suivant le Tao.
L'homme ordinaire cours après les richesses, les honneurs, le savoir. Pourtant toutes ces richesses, qu'elles soient matérielles ou non appartiennent à l'Univers, aussi touts les objets, qu'ils soient ordinaires ou précieux sont la "propriété" du Tao. A ce titre, tout le monde peut les revendiquer. C'est la loi de l'homme qui divise les biens et attribue leur répartition.  Même le savoir est mauvais à accumuler. En effet, le Tao unit toute chose et par ce biais vous gratifie de l'attitude à adopter pour chaque situation et ce de manière intuitive, instantanée. Dès lors à quoi bon mémoriser un savoir qui vous sortira de l'instant présent ?


Rechercher dans ce blog