Houei-tseu dit à Tchouang-tseu : "Vos paroles sont inutiles."
Tchouang-tseu lui répondit : "Il faut savoir ce qui est inutile pour connaître ce qui est utile. Bien que la terre soit immense, ce qui est utile à l'homme, c'est un endroit où poser ses pieds. Supposons que devant ses pieds s'ouvre un abîme, la terre lui serait-elle encore utile ?
- Non, certes, dit Houei-tseu.
- Alors, dit Tchouang-tseu, il est clair aussi que l'inutile est utile."
Une fois encore, Tchouang-tseu fait l'éloge de l'inutile ! Grâce à son inutilité l'arbre noueux peut vivre longtemps et pousser sans craindre de finir abattu par le bûcheron pour être transformé en poutres et en planches dans une scierie. De la même manière le sage taoïste ne dit rien et semble de prime abord inutile, mais ce détachement, ce lâcher prise total offre à l'autre un espace d'accueil rare et précieux. L'être désintéressé que propose le taoïste est accessible à tous et gage d'un parfait échange d'être à être, ce qui est rare de nos jours. Le sage taoïste est le représentant du Tao et de l'Unité du
Monde, il reflète l'Universalité des choses et a ce titre ne se met pas en avant et respecte tous les êtres. Il vénère la vie et est toujours désolé lorsque la mort surgit, fusse-t-elle celle d'un insecte. Mais il sait aussi que la mort est un retour au Tao, il ne s'afflige donc pas de la mort, fusse-t-elle celle d'un proche. Le Tao, comme l'eau qui s'écoule inexorablement vers la vallée, semble être inutile, pourtant, ce statique principe, est à l'origine de la vie, le sage s'en remet à lui aveuglement.
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire