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vendredi 24 juillet 2020

Le vide de l'Esprit



En méditation, on apprend à faire le vide dans ses pensées. Dans la vie de tous les jours, le sage, lui aussi, fait le vide dans ses pensées. Pourquoi ? Parce que voir avec lucidité ce que le Tao propose nécessite le calme, la paix de l'esprit.
Ce que veut le Tao est à peine perceptible, on peut se rappeler qu'il est sans désir. Et si l'équilibre naturel est présent, il est sans agir. Aussi notre action doit être limitée sans aucun désir personnel ni acte insensé. 
Nous devons prendre la vie comme un adepte du Kung-Fu prend le dessus sur un adversaire : l'adepte utilise l'énergie de son adversaire pour le conduire au sol. Nous devons utiliser l'énergie dont nous entoure le Tao pour parvenir non pas à nos fins, mais à l'équilibre du Tao.
Et pour trouver cette fin subtile, rien ne vaut le vide de l'esprit. Nous ne trouverons jamais un Saint Homme en prise à de profondes réflexions, nous le trouverons plutôt en méditation, et en méditation sur quoi ? Sur le vide de l'esprit. Car c'est dans le vide de l'esprit que le Saint Homme fait réellement corps avec ce qui est vraiment, et ce qui doit être.
Dans la méditation Da Mo que j'ai la chance de pratiquer, il y a un sutra qui dit : "dans le vide de
l'esprit véritable, tout ce qui sauve le monde peut se déployer". Pour le novice, cette phrase peut sembler déroutante : qu'est-ce qui peut sauver le monde ? Et est-ce le vide qui est véritable ou est-ce l'esprit ?
Tout d'abord nous devons définir ce qu'est le monde, et la façon dont nous le percevons. Tout ce que nous savons du monde, et j'ai bien dit tout, nous l'avons perçu par la fenêtre de l'instant présent. Et c'est donc cette fenêtre que nous nous devons de nettoyer si nous voulons être en accord parfait avec le monde. Or comment clarifier l'instant présent si ce n'est en faisant le vide dans nos envies, nos désirs, nos pensées égotiques. Car je le redis, nos pensées incessantes perturbent notre relation avec l'instant présent et donc notre vision du monde. 
L'esprit est véritable, car il n'appartient à aucun d'entre-nous, il représente le monde en interaction dans l'instant présent, il représente le Tao et sa recherche d'équilibre. En faisant le vide, on nettoie la fenêtre pour voir l'inclination du Tao. Et si celui-ci à besoin d'aide, d'un petit coup de
pouce, nous pouvons, avec l'aide du Tao, rentrer en action. Mais, bien entendu, la quasi totalité du temps, le Saint Homme reste en méditation, tant le Tao ne désire rien. Une infime partie du temps, il sauve le monde.
A la différence de nombre de voies spirituelles, le Taoïsme se centre sur l'individu, ce qui sauve le monde doit donc être pris par le bief de l'individu. Et ce n'est pas l'individu qui sauvera un pays contre une attaque nucléaire, à moins qu'un individu en prise avec l'esprit véritable soit aux commandes de l'avion bombardier...

vendredi 17 juillet 2020

Ennui



Avec le confinement dont nous sortons à peine, il m'est venu des périodes où l'ennui prenait le dessus. Je n'avais rien à faire et j'étais désœuvré. Pourtant le Tao étant toujours là, j'avais accès à son oeuvre, à sa volonté. Mais l'oeuvre du Tao est le Non-Agir, et sa volonté le Non-Désir. Rien d'étonnant alors que le vide du Tao envahisse ma vie... Au point de me déstabiliser. Et ce manque d'équilibre est, pour moi qui suis bipolaire, assez dangereux. Je ne suis pas à l'abri de sombrer dans la déprime. Pour éviter ces problèmes, j'ai la possibilité de rentrer en méditation. Pour faire quoi ? Pour contempler ce vide qu'est le Tao, et peut-être accessoirement, y trouver du réconfort. Car la force du Tao est dans l'être et non dans l'agir.
Prendre la plume et décrire ce qu'apporte le Tao vient alors naturellement tant le sujet est inépuisable.
Un Lao Tseu a décrit ce Tao ambiguë en quelques lignes. Un Tchouang Tseu l'a brossé en mille histoires. Ce qui en ressort est une force de vie présente malgré tous les aléas, plus forte que la mort, plus forte que la maladie, et donc plus forte que la déprime.
Car l'être est plus fort que le faire. On voit certaines personnes s'agiter dans tous les sens et courir en toutes directions. Elles semblent très équilibrées mais ne savent pas se poser. Elles vous disent que la vie est dans l'action. Mais, ce faisant, elles ne sont jamais rassasiées, et en demandent toujours plus. Et comme elles ont trouvé ce mode de vie, elles n'imaginent même plus ce qu'elles pourraient être sans cette hyper activité. 
Les personnes qui prennent les postes à haute responsabilité suivent trop souvent ce schéma embarquant à leur suite une multitude de gens qui comme vous et moi ne voient pas l'utilité de tant d'action. Bien souvent, il suffit de non agir, d'attendre le bon moment, pour qu'une infime prise de décision apporte une solution naturelle. Oh
bien sûr dans ce cas le décisionnaire ne peut pas s’enorgueillir d'avoir agi, tellement la solution était devenue évidente, mais telle est la position du Sage, il s'efface devant les hommes, il s'efface devant le Tao.
Et puis l'instant présent est, pour celui qui suit le Tao, toujours plein de surprise. C'est lui que l'on retrouve en méditation, mais c'est aussi lui que l'on retrouve dans la contemplation quotidienne. Ainsi, même mon bureau en apparence fort calme est le siège d'une infinie activité, celle de la vie tout simplement. des insectes se promènent sans même imaginer que je les observe, une pie vient se poser sur l'antenne de la maison, le vent qui agite un peuplier au loin... 
Pour celui qui est sans désir, cette activité de l'instant suffit à le combler d'émerveillement. Alors pour ne pas se laisser submerger par l'ennui, il suffit de succomber aux choses simple que la vie nous offre d'instant en instant, laisser le Tao abreuver nos vies et toujours s'émerveiller de ce qu'il peut nous apporter; le vide, l'immobilité, et à travers cela, la vie, le mouvement !


samedi 11 juillet 2020

Instinct Animal



Perdu dans la foret l'animal sait - s'est il vraiment perdu - instinctivement dans  quel direction aller pour retrouver sa route. Il flaire aussi sa proie, comme il flaire le danger. Quel est son secret ? Etre attentif à l'instant, compiler toutes les données que lui fournissent ses sens aux aguets. Au printemps, à la période des amours, le mâle est irrésistiblement attiré par la femelle, et la pérennité de l'espèce est assurée.  
On a coutume d'appeler cela de l'instinct animal, mais n'est-ce pas là une simple question de bon sens. Sans remonter jusqu'à Adam et Ève, l'homme primitif faisait confiance à son instinct pour le guider. Il est légitime de se demander d'où provient l'instinct ? Etre à l'écoute de l'intérieur - ce que l'on ressent - comme de l'extérieur - ce que l'on sent - et percevoir ce qui crée du sens, de l'équilibre. Cette perception fine, ténue ressemble à ce que Lao Tseu désigne par Tao. 
Pour revenir à Adam et Ève, ce que Dieu soufflait à l'oreille du premier couple de l'histoire disparaît avec le fruit du savoir. En quoi le savoir éloigne-t-il de Dieu ? Le savoir est issu de l'activité du cortex. Et chez bon nombre d'entre nous, il fait un tel vacarme, que nous ne sommes plus sensible au Tao, à Dieu. Aussi, pour faire renaître l'instinct chez l'homme, il faut apprendre à calmer le cortex, à faire taire le mental comme le disent les mauvais manuels de spiritualité. Ainsi, nous allons apprendre à laisser notre ressenti émerger et le combler avec nos sens.
La difficulté, car il y en a une, c'est que le Tao étant sans désir, ne s'exprime pas, son langage est le silence. On ne verra jamais le Tao prendre parti entre le mulot et le chat, le premier est averti du danger, le second est averti de la présence d'une proie. Mais jamais on ne verra le Tao favoriser l'une ou l'autre de ces deux petites bêtes. Le langage du Tao est ténu, subtil, c'est pourquoi il est si peu connu et si peu reconnu.
Pourtant, quand vous avez compris que le mental se complaît dans l'univers du connu - il ne peut que ressasser, au mieux imaginer le connu - vous cessez de lui faire confiance, et vous vous ouvrez à l'instant, au Tao.  
Beaucoup qualifient de divins ces moments magiques de communion avec la nature. Mais ils n'ont de divin que le contraste qui existe entre la vie avec mental, et la vie sans mental.
Habituons-nous a vivre sans l'aide du mental, écoutons ce que notre instinct a à nous dire. Décryptons son subtil langage et complaisons-nous dans le Non-Agir qu'il nous dicte. En aucun cas n'agissons de notre propre chef, attendons le moment dicté par l'instinct, ce moment sera le bon. 
Je sais, c'est une vie non "savante", non intellectuelle à laquelle je vous convie. Mais c'est une vie vibrante, pleine de surprises et de bonnes surprises qui attend l'homme qui rejoint le Tao. Alors soyons fous et franchissons le pas de la confiance en l'instinct.


vendredi 3 juillet 2020

Souffrance



Celui qui a fait le plus pour la description de la souffrance et en déterminer les causes c'est à coup sûr Bouddha Gautama. Ses 4 nobles vérités décrivent en effet la souffrance, les causes de la souffrances, la cessation des souffrances par la recherche des causes, le chemin menant au Nirvana, ou encore l'octuple sentier. 
La vision du Bouddha est pertinente, je lui reproche cependant un manque de concision. Par exemple pour devenir expert sur le chemin de l'octuple sentier, il faut avoir une vision correcte, une pensée correcte, une parole correcte, une action correcte, une profession correcte, un effort correct, une attention correcte, une contemplation correcte. Dit comme cela, ce n'est pas donné à tout le monde ! 
Pourtant Bouddha va articuler son enseignement sur les 4 nobles vérités et sur l'octuple sentier. Aussi,
si l'on veut être son adepte, il faut veiller 1) à la souffrance, 2) aux causes, 3)...1) à la vision, 2) à la pensée 3) à la parole 4)... Ça n'en finit plus, et à moins d'être moine (ce que Bouddha recommandait)  on est sûr de ne pas y arriver !
De plus, si l'on étudie les causes, il y a la souffrance physique due aux diverses maladies et autres dysfonctionnement des organes, et la souffrance psychologique qui peut avoir plusieurs causes. Si je suis Bouddha, je dois trouver les causes de mon mal de dos. D'accord je n'ai de toute ma vie jamais fait attention à me tenir droit. Et j'ai eu à l'age de 13 ans un grave accident de vélo qui s'est sans doute aussi porté sur ma colonne vertébrale. Bien Gautama, je fais quoi avec ces causes ?
Non, il semble évident que la spiritualité ne peut pas guérir de tous les maux. Cependant elle peut aider à mieux supporter la souffrance et les maladies. N'oublions pas que le Bouddha lui même est
mort d'une intoxication alimentaire. Il n'a donc pas été à même, malgré l'octuple sentier, de vaincre la maladie.
Pour être honnête, je dois ajouter que Bouddha a prôné la voie du juste milieu. Appliquée à la lettre, celle-ci conduit au lâcher prise et au lâcher prise de toute attache et en particulier au lâcher prise des pensées, des désirs. Elle conduit à être plus instinctif, à moins faire confiance à son mental. On privilégie alors son cerveau reptilien et on laisse de côté le mental réfléchi du cortex. Or le cerveau reptilien a pour rôle de réguler le métabolisme, c'est lui qui est responsable de la gestion de notre corps, ne pas le parasiter avec les petits ou gros tracas du mental nous garantit un fonctionnement
optimal de nos organes et donc une moindre exposition aux souffrances.
Lao Tseu quand à lui recommande d'être sans désir, sans agir et sans lutter. Cette attitude ne laisse pas d'emprise au mental, et conduit directement, sans passer par l'octuple sentier, à un comportement intuitif ancré dans le présent qui éloigne de la souffrance Lao Tseu dit que sa voie écarte de la corne du rhinocéros des griffes du tigre et du glaive du soldat. 
A coup sûr les deux doctrines mènent au même résultat : la libération et en particulier la libération des souffrances. L'une des voies est plus concise, l'autre est plus détaillée, à chacun son style... 

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